Une étude préliminaire sur un petit effectif avait été réalisée au CHU d’Amiens en 2010, mettant en évidence une augmentation du total dermoscopique Score (TDS) des nævus après un traitement par radiothérapie externe.

Nous avons réalisé une étude prospective, monocentrique au CHU d’Amiens. L’objectif principal était de comparer en vidéo-dermoscopie la variation du TDS de nævus situés sur le champ de radiothérapie externe, à la variation du TDS de nævus non irradiés avant, immédiatement après, 6 mois et 1 an après la radiothérapie externe.

Trente-neuf patientes traitées en radiothérapie pour un cancer du sein ont été incluses ; 99 nævus irradiés ont été analysés et comparés à 108 nævus non irradiés. Chaque patiente était son propre témoin. L’ensemble des nævus étudiés se situait sur des zones non photo-exposées. Nous avons observé une variation significative du TDS dans le groupe nævus irradiés, 6 mois et 1 an après le traitement, en comparaison au groupe nævus non irradiés (p<0,0001). La variation moyenne dans le groupe irradié à 6 mois était de 0,37 (IC95 % : 0,28–0,46). Lors de l’examen à 1 an, cette variation était persistante, en moyenne à 0,29 (IC95 % : 0,18–0,39). Il n’y avait aucune variation du TDS dans le groupe témoin. Les modifications dermoscopiques concernaient le critère « structure dermoscopique » et le critère « couleur ». Les points noirs, ainsi que les aires sans structures étaient disposés de façon régulière. L’hyperpigmentation était toujours homogène. Aucun des nævus du groupe irradié n’a présenté un score TDS>4,75. Les autres facteurs étudiés tels que l’âge, le phototype, les antécédents personnels ou familiaux de mélanome, les antécédents d’irradiation, la dose, l’étalement, la sévérité de la radiodermite, une chimiothérapie ou une hormonothérapie concomitante n’influençaient la variation du TDS observée.

Les modifications dermoscopiques des nævus après irradiation se rapprochent de celles observées après une exposition aux ultraviolets. Les ultraviolets activeraient les mélanocytes et entraîneraient des modifications du patron des nævus avec apparition ou modification des points noirs et globules, apparition d’une hyperpigmentation homogène. L’ensemble des modifications est réversible 1 an après l’exposition aux ultraviolets. Il est difficile de savoir si les modifications observées dans notre étude après irradiation correspondent à de simples modifications physiologiques inflammatoires réversibles ou si elles correspondent à des lésions cellulaires plus complexes.

Les modifications dermoscopiques des nævus irradiés ne sont pas réversibles à un an de suivi. Ces résultats nous incitent à poursuivre le suivi, afin de déterminer si l’irradiation nécessiterait une surveillance dermatologique clinique et dermoscopique spécifique.